Métamorphoses et parole de nuit

collection métamorphoses

La collection « Métamorphoses » s’enracine dans une tradition séculaire de l’espace kréyolphone : celle de la « Parole de nuit ».

Dans les sociétés créoles, les contes – véritables vecteurs de sagesse, de résistance et de mémoire collective – ne se dévoilent qu’après le coucher du soleil. Cette restriction temporelle n’est pas anodine : la nuit représente un espace-temps sacré où les frontières entre visible et invisible s’estompent, où les esprits circulent librement, où la parole acquiert une puissance rituelle.

De la Parole de nuit aux lumières parisiennes

Parole de nuit avec Konpè Lapen. @Alexia de Saint John's
Parole de nuit avec Konpè lapen. @Alexia de Saint John's

Parole de nuit

Konpè Lapen, figure emblématique de ces récits nocturnes, incarne à la fois la ruse du faible face au fort et l’intelligence adaptative nécessaire à la survie. Traditionnellement, ce personnage n’existe que dans l’obscurité du conte, sa silhouette dessinée uniquement par la voix du conteur et l’imagination des auditeurs rassemblés en cercle.

Ma démarche artistique opère une double transgression créatrice : d’abord en donnant forme visible à ce héros de l’oralité, puis en le transportant dans la lumière éclatante des terrasses parisiennes de la Belle Époque. Ce passage de l’ombre à la lumière, de l’invisibilité à la représentation, symbolise l’émergence des cultures créoles sur la scène mondiale et leur capacité à se réinventer tout en préservant leur essence.

Ombre et lumière

Les cafés parisiens, lieux d’échange intellectuel et de visibilité sociale par excellence, deviennent ainsi le théâtre d’une métamorphose : celle d’un personnage nocturne qui conquiert l’espace diurne sans perdre son mystère.

La multiplicité des Konpè Lapen dans mes compositions évoque tant la diversité des versions du conte à travers l’espace kréyolphone que la nature insaisissable d’un héros qui, même exposé à la lumière, conserve sa part d’ombre.

En transposant la « Parole de nuit » dans l’éclatante sociabilité parisienne, ces œuvres interrogent la transmission de notre patrimoine immatériel : comment nos récits ancestraux peuvent-ils voyager à travers le temps et l’espace sans se dénaturer ? Comment l’identité créole peut-elle s’affirmer dans sa spécificité tout en dialoguant avec d’autres univers culturels ?

Konpè Lapen. Paris. Terrasse des cafés de la Belle Epoque. n10@Alexia de Saint John's

Cette collection invite ainsi à un voyage entre deux mondes : celui des veillées nocturnes où naissent les contes et celui des cafés ensoleillés où ils se réinventent, entre le mystère de la nuit créole et l’éclat des lumières parisiennes, entre la sagesse ancestrale de Konpè Lapen et ses métamorphoses contemporaines.

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